11.5.2004
Cher Raphaël,
je viens comme promis de visiter le site du work in progress (!), le premier dictionnaire en ligne du créole. Quelle belle idée ! Je me prends à rêver du même, ici, en Corse où, tu le sais nous nous battons avec nos petits bras pour défendre notre bien, notre patrimoine, qui tous les jours semble un peu plus partir en lambeaux. Rien ne sert de se lamenter, il faut, ainsi que tu le démontre, se mettre au travail et... travailler! Mon pauvre père avait l'habitude de dire qu'il faut à un moment arrêter de regarder le vélo, et enfin monter dessus pour pédaler.
Tu as vu que la revue que nous animons, A pian d'Avretu, tente de construire un espace critique où, de plus, la langue corse peut s'exprimer sans paraître ghettoïsée. C'est tout un dur labeur que de refaire prendre confiance dans la langue corse, une magnifique langue à l'histoire récente douloureuse. Et tu sais combien ce sont les tiens qui, en général, dans ce cas, sont les plus difficiles à convaincre de la justesse et de la beauté de cette lutte. Renégats, faux prophètes, deséspérés, amnésiques et oublieux forment alors un bataillon difficile à contenir quand c'est tout une politique, celle du dominant, qui se trouve à les pousser dans le dos.
Je suis heureux pour ma part que ce travail reçoive le succès (vu le nombre de consultations en si peu de temps) qu'il mérite.
J'imagine les difficultés d'arbitrage éventuel (je pense aux nôtres, notamment dans l'édition) entre les diverses approches et interprétations (orthographe, sémantique, etc.) des mots créoles. Quelle "recette" appliques-tu en cas de difficulté?
Tu voulais aussi que je dise un petit mot en langue corse, histoire de se saluer dignement entre cousins insulaires - c'est ce que les tenants des pouvoir centraux n'ont pas compris : on est tous cousins dans une île, mais aussi d'île en île - allora eccu,
vuliu dì dui paroli par salutà cum'e 'ddu si devi a nascita di u primu dizziunariu criolu annant'à u web. Un' opara nova è piena di spiranza pà tutti quiddi chì credini à a supravivvanza di tutti i lingui detti "minori" o "minorati". Parchì induva una lingua cuntiniveghji di campà, ghj'hè u populu, a ghjenti intrevi, chi pò cuntinivà di creda chì tuttu u caminu annant'à sta terra ùn sara micca sempri à u bughju.
A lingua si devi purtà cum'e l'antica lumera davant'à nosci passi, par impediscici di casca...
Evviva i nosci lingui, è merda à i spiritacci parighjini !!!
Bernard Biancarelli (Corsica)
43 - je viens comme promis ...
De loin, nous suivons le difficile combat que mènent les Corses pour sauvegarder un minimum d'identité et nous vous admirons car vu la proximité géographique du pays dominant, la menace est encore plus grande que chez nous, aux Antilles, puisque nous nous trouvons sur un autre continent.
Sur les "nôtres" qui se renient, trahissent, s'auto-méprisent etc..., rassure-toi, c'est chose courante aussi chez nous, en particulier à la Martinique qui a toujours été la place-forte de la colonisation française aux Amériques. Depuis 1635 en fait ! Date, ô combien symbolique de la création de l'Académie française par Richelieu.
Pourtant, tout comme vous, ce que nous demandons, ce n'est pas la lune : juste une place équitable pour notre langue et notre culture. Un minumum de respect, quoi ! Même cela, l'Etat central fait d'énormes difficultés à nous l'accorder et quand, sous notre pression, il semble lâcher quelque chose, il s'empresse de le reprendre de manière détournée.
Le scandale du jury du CAPES de créole en est le meilleur exemple. Comme tu le sais peut-être, il est composé, depuis trois ans qu'il existe, par des gens qui se sont publiquement (dans les journaux, à la radio, à la télé etc...) prononcés vigoureusement contre...la création de ce CAPES. Mais bon !
Cela ne nous empêche pas de continuer notre lutte dont sans doute notre génération ne verra pas les fruits. Ce serait bien si vous pouviez nous envoyer de temps en temps des articles ou des infos sur la Corse afin que nous les mettions sur notre site. Nous y avons d'ailleurs depuis le début une rubrique "Corse".
Fratello mio, la nostra lotta è la stessa !
(Mi scusi, non conosco la lingua corsa ma ho studiato l'italiano quindici anni fa)
Raphaël
Sur les "nôtres" qui se renient, trahissent, s'auto-méprisent etc..., rassure-toi, c'est chose courante aussi chez nous, en particulier à la Martinique qui a toujours été la place-forte de la colonisation française aux Amériques. Depuis 1635 en fait ! Date, ô combien symbolique de la création de l'Académie française par Richelieu.
Pourtant, tout comme vous, ce que nous demandons, ce n'est pas la lune : juste une place équitable pour notre langue et notre culture. Un minumum de respect, quoi ! Même cela, l'Etat central fait d'énormes difficultés à nous l'accorder et quand, sous notre pression, il semble lâcher quelque chose, il s'empresse de le reprendre de manière détournée.
Le scandale du jury du CAPES de créole en est le meilleur exemple. Comme tu le sais peut-être, il est composé, depuis trois ans qu'il existe, par des gens qui se sont publiquement (dans les journaux, à la radio, à la télé etc...) prononcés vigoureusement contre...la création de ce CAPES. Mais bon !
Cela ne nous empêche pas de continuer notre lutte dont sans doute notre génération ne verra pas les fruits. Ce serait bien si vous pouviez nous envoyer de temps en temps des articles ou des infos sur la Corse afin que nous les mettions sur notre site. Nous y avons d'ailleurs depuis le début une rubrique "Corse".
Fratello mio, la nostra lotta è la stessa !
(Mi scusi, non conosco la lingua corsa ma ho studiato l'italiano quindici anni fa)
Raphaël