3 ans déjà, devrions-nous crier victoire?

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kelita
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3 ans déjà, devrions-nous crier victoire?

Message par kelita »

Nous revoilà encore fragiles, faibles mais debout sous un ciel obscur à faire le mémorial de cette date fatidique qui nous rappelle ce triste événement où cet après midi comme un coup de tonnerre, un vacarme assourdissant, tout s’est écroulé autour de nous en quelques secondes seulement. On a pleuré, à verse. Nos larmes ont inondé notre espoir de vivre dans un pays où l’existence de jour en jour se laisse à désirer.

Haïti en ce jour la fut ensevelie, enterrée sous des tonnes de décombres. Des cadavres par milliers ramassés puis déversés comme des ordures dans des fosses communes. Une communauté de morts qui sont partis pour la victoire ou pour le désespoir de ces milliers de réscapés qui foulent encore de leurs pas le sol aride par la haine, la persécution, la violence, la vengeance de ce pays ?

Des gens qui existaient, respiraient, vivaient malgré vents et marées. Et cela fait 3 ans, ils ne vivent plus, ne respirent plus, n’existent plus. Ils sont partis dans le lointain pour faire le long voyage, ce voyage de non retour, vers ce pays inconnu que nous les vivants ne connaissions pas encore.

Et quelques jours après cette catastrophe, des centaines de voix se sont élevées pour parler de « reconstruction » de « refondation ». Des mots, des slogans qu’on crie sans aucune forme de réflexions aisées et de planification véritable.

Des mois après, toujours dans les mêmes conditions, pires qu’avant ; tristes, fragiles, l’esprit abasourdi mais debout dans les urnes, cartes en main, convoqués en nos comices on a été voté pour la démocratie, le changement et la reconstruction de notre pays.

Marée, marasme, complot, fourberie, manœuvre, malgré tout on a choisi « Viktwa pou pèp la » criait-on. Oui victoire pour le peuple qui a eu le dernier mot, qui a eu gain de cause ! Une cause qu’il s’est chargé de confier aux autorités en ses lieux et places de plaider. Car Haïti n’en peut plus, ce peuple en a plus que par-dessus la tête. Il nous faut vivre un autre rêve, une autre réalité, changer radicalement les conditions humiliantes infrahumaines dans lesquelles nous gisons depuis des décennies.

Le chantier de la reconstruction doit s’ouvrir, nos murs écroulés doivent se remettre debout ! Malheureusement c’est tout le contraire qui se produit dans les esprits eux-mêmes malbâtis.

Comment dans ces conditions reconstruire, rebâtir ce pays, revigorer cette population en manque, assoiffée, languissante, mendiant son pain en chaque carrefour, le pain quotidien qu’elle ne trouve nulle part, piètre victoire !

La bataille pour le changement, la démocratie, la justice, gagne en flamme les coins des rues de la ville. Des tirs nourris, des rafales, des bandes armées se défilent dans les quartiers, volent, violent tuent les habitants qui fuient cette insécurité grandissante. La paix viendra-t-elle un jour adoucir nos âmes sans cesse bouleversées par la peur ? Oui nous avons peur car la victoire est loin d’être assurée et la bataille est plus que jamais engagée pour ce peuple abandonné, pour ces enfants délaissés, pour ces jeunes dépravés.

Pour ces pauvres vieillards à l’Asile communal abandonnés sans pitié, mourant de faim et de soif. Qui viendra enfin restaurer, rebâtir cet endroit de la ville qui hier accueillait nos grands-parents à la retraite, les veufs, les veuves et ceux-la qui n’ont pas d’enfants. Ces gens du 3 ème âge qui s’y retrouvaient tout à leur aise.

Qui se chargera de désarmer ces bandes armées qui sèment la panique et le deuil au milieu de la population ?

L’odieuse réalité que 12 janvier nous a étalé devant les yeux est devenue plus grande. La masse pataugeant dans la crasse pourra t-elle crier victoire ? Ces jeunes qui se laissent aller à la débauche, la prostitution, le banditisme, la manipulation pourront t-ils crier victoire ? Ces familles haïtiennes aux abois, marchant les deux bras derrières comme menottées par les vicissitudes et les péripéties de l’existence pourront-elles crier victoire ?

Un pays où l’espoir ne semble nullement se dessiner à l’horizon puisque personne n’en a cure de se mettre au travail pour véritablement faire avancer les choses qui se dégradent de plus en plus. Plus d’un se plaignent, d’autres gémissent.

La population est sur le qui vive et ce phénomène de kidnapping qui depuis un certains temps s’est ajoutée à la plaie qu’il ravive, et pourtant Haïti doit vivre. Pour nos ancêtres, pour nos jeunes, pour ses filles et fils.

Le pays doit sortir vivant, victorieux de la violence, de la haine, de la misère, de ces fosses communes. Même si la terre tremble, nous ne devons pas trembler ! Nous devons garder les deux pieds fermes sur terre, garder fixes nos esprits pour continuer la marche vers la liberté. Les jeunes doivent continuer à se battre pour conquérir la place qui leur revient, qu’ils méritent.

Pour qu’Haïti vive, ses enfants doivent vivre pour que l’avenir soit assuré. Il appartient à eux de tenir le flambeau allumé pour effectivement bâtir, reconstruire ce pays suivant un planning bien établi.

Il nous faut faire obstacle à la médiocrité à outrance. Des têtes bien faites et non pleines d’idées farfelues, de planifications désastreuses qui tuent. La débâcle intellectuelle doit cesser car la tâche à accomplir est plus ardue, plus colossale et nécessite l’implication de tous sans discrimination, sans préjugés.

En ce nouvel an ou le 1er janvier nous avons commémoré la 209 ème année de notre indépendance et en cette date immémoriale du 12 janvier désormais inscrit dans le calendrier quotidien de notre histoire, nous avons pour obligation de relever à son plus haut niveau la fierté qu’a su fait montre nos Aïeux qui se sont sacrifiés pour nous léguer cette terre en héritage. Nous devons assurer coûte que coûte le demain de nos enfants.

3 ans déjà, devrions-nous crier victoire ? On ne le croit pas car tant de choses avant le 12 janvier étaient à faire et à refaire et nous en sommes au même point.

La victoire pour le changement, la paix, la justice, le progrès, le développement durable, l’assurance du bien-être de tout un chacun reste et demeure aujourd’hui encore un idéal qu’on envisage, un rêve à conquérir.


Tous mes hommages aux victimes du 12 janvier et à ceux et celles qui vivent encore je leur souhaite du courage.
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